1990. C'est le début du marchandising pourri qui entoure toutes les coupes du Monde de Foot. Passés les albums Panini, la Master System qui est une des premières consoles qui soit vraiment tout public. Du coup, World Cup Italia '90 devra être un jeu classe, jouable, élaboré.
Puisque c'est le jeu de la coupe du Monde, on peut donc jouer la Coupe, mais aussi faire des matchs amicaux et des séances de tirs au but. Les 24 équipes sélectionnées sont donc dans le jeu (juste les pays, pas les joueurs, faut pas déconner), plus cinq équipes bonus dont la France (qui, pour les non amateurs de foot, c'est fait brillament éliminer après un match nul à Chypre). Le graphisme, pour 1990, a de la gueule. Le personnage animé jongle avec fluidité, et ça, il y a 15 ans, c'était pas gagné. Et en plus son maillot change de couleur de fonction de l'équipe. Fantastique (par contre ils sont tous bruns avec les cheveux longs). On note aussi qu'on peut jouer à deux, comme la plupart des jeux de l'époque. Enfin pour les matchs amicaux; la coupe du monde à deux c'est pas encore gérab'.
On n'a pas attendu Footix pour créer des mascottes pourries.
Question match, le graphisme est aussi au rendez-vous. Bien sur, on n'a là qu'une seule vue, du haut. Le match doit se jouer en 8 contre 8, les bonhommes sont tous pareils, comme des joueurs de baby dont on voit les jambes, surtout quand ils taclent. Une élégante petite flèche indique le joueur que l'on contrôle, et la plupart du temps le joueur dont on se fout totalement. On est impressionné par l'effet très réaliste du ballon lorsqu'il monte dans les airs : il apparait très gros à l'écran (ce qui signifie quand même un shoot d'une bonne trentaine de mètres en hauteur, chapeau), mais pour l'époque l'effet est réussi. Le jeu se limite à deux actions : le tir et la passe. Il est même conseillé de partir avec un seul joueur, et au bout d'une petite heure de jeu on se rend vite compte qu'il y a un endroit où frapper pour marquer à 90%. De la place pour le graphisme c'est moins de place pour les langues, c'est donc "Throw In" et autres "Corner Kick" qui s'affichent. Comme ça, on a au moins l'excuse de parler anglais.
Dans son short taille douze ans, cet footballeur de la RFA gère les jongles.
On peut donc jouer les matchs amicaux à deux, en choissisant évidemment Allemagne de l'Ouest - Argentine (sinon les matchs sont un peu pourris). Le changement de joueur est très compliqué, et, là encore, partir avec un seul joueur jusqu'au but est une très bonne tactique. Pour avoir usé de la manette sur ce jeu, réaliser une action avec plusieurs joueurs est jubilatoire, et vaut aisement trois tours de maison (pendant que l'autre joueur ira marquer). Et pour ceux qui voudraient faire une petite partie avant de partir en cours (donc en CE1 à cette époque), une petite séance de tirs aux but s'impose. Là encore, le choix des équipes est le même, et on se retrouve avec un tireur baraqué comme deux nageurs de l'ex-URSS contre un goal habillé en fluo. Là, pas le temps de voir le ballon partir pour essayer de l'arrêter : les frappes sont des vrais boulets, des tirs instantanés. On notera que même avec une frappe qui doit détrousser les coutures de la chaussure le filet du but reste intact, sans bouger. Quant au gardien, une fois allongé, il est bien là et il y reste.
Les concepteurs du jeu devaient aimer les choses carrées.
Mais le but ultime du jeu est de remporter la Coupe du Monde. Un bon point au début, c'est que les équipes sont réparties dans les mêmes groupes que pour la vraie Coupe du Monde en Italie, sauf évidemment dans le cas où on voudrait prendre une des équipes bonus (mais gagner avec la Hongrie c'est pas évident). Facile donc de se retrouver face à des équipes faciles pour les trois premiers matchs. En prenant la R.F.A. (le vrai vainqueur de dedans la vraie vie), on se retrouve face aux Emirats Arabes Unis, à la Colombie et, pour finir, la Yougoslavie, le plus dur... Mais normalement, la qualif' est déjà dans la poche [
1]. On a le droit à un joli tableau récapitulatif, plein de croix et de ronds, assez incompréhensible (après quelques mois, on comprend que les ronds sont les matchs gagnés, waouh). La qualification se passe donc à l'aise pour peu qu'on ait su choisir une bonne équipe où qu'on maitrise parfaitement le jeu. D'autant plus que les deux premiers de la poule de 4 sont qualifiés, ainsi que les 4 meilleurs troisièmes, donc
y a la place.
Mais voilà que se profilent les huitièmes de finale, et là c'est le pantalon qui commence à s'humidifier (on rappelle que je n'ai que 10 ans - en rejouant j'ai beaucoup plus gardé mon calme). Parce que là, pas de mot de passe, pas de sauvegarde pour recommencer tranquillos, non, tu gagnes ou tu éteins la console. Toujours avec la R.F.A., on tombe contre l'Uruguay en huitième, les Tchèques ou le Costa Rica en quart. Le gros morceau arrive en demi-finale, avec la Hollande dans le meilleur des scenarii, l'Argentine dans le pire et la majorité des cas. C'est clairement le passage obligé des manettes dans la télé et des roulades par terre. Une petite envie de balancé m'a d'ailleurs repris, puisque j'ai lamentablement perdu en prolongations. Une terrible récompense après une bonne heure de jeu, avant de voir les Brésiliens ou les Italiens remporter le trophée (sans même un Merci ou un Merde, t'as perdu : t'as perdu). Gagner n'est pas impossible, il faut juste garder son sang-froid et ne pas s'enerver de ne pas marquer contre une équipe pourtant toute pourrie,
alors qu'on a foutu 4-0 à la Tchécoslovaquie juste avant. Et éviter de se prendre un but casquette, parce qu'une télé ça coûte cher et ça resiste que très peu aux manettes volantes.
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